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  • Aricle paru dans la magazine Savoir Perdu

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  • Où tombe la foudre en ce moment ?

    Conférence Mondiale des Survivants de la Foudre

    Foudroyés, miraculés mais pas comblés
    30 Août 2007
    Un à un, les survivants de la foudre livrent leur témoignage. Steve a été opéré trente-huit fois. Marianne se cogne aux tables et aux portes. Mike n'a plus besoin de béquilles. Linda a la voix étranglée par les larmes : en vingt-quatre ans, la foudre l'a frappée quatre fois.

    Les récits se succèdent à la Conférence mondiale de l'Association internationale des survivants de la foudre et de chocs électriques organisée à Pigeon Forge, dans le Tennessee. On pense souvent que la foudre ne laisse derrière elle qu'un petit tas de cendres. Or il est rare de mourir foudroyé. Neuf personnes sur dix survivent, estime Mary Ann Cooper, professeur de médecine à l'université de Chicago, l'une des rares spécialistes de la question. Mme Cooper fait partie de la direction du groupe de soutien qui organise chaque année la Lightning Strike and Electric Shock Survivors International World Conference. L'association compte 1 400 membres venus du monde entier. Tous, même lorsqu'ils sont gravement blessés, sont confrontés à la même absence de reconnaissance, car on s'intéresse plus aux morts qu'aux survivants. La centaine de participants rassemblés à Pigeon Forge racontent leurs douleurs inexpliquées, leurs crises de panique, leurs états confusionnels, et leur difficulté à convaincre leur entourage. Comme la foudre laisse rarement de traces de brûlures visibles, les victimes n'ont généralement pas de signe physique qui puisse étayer leurs dires. "Cette conférence est le seul endroit où je peux répondre en toute sincérité quand on me demande comment je vais", confie Jim Segneri, membre de l'association. La rencontre comprend aussi des interventions de spécialistes, ainsi que l'élection du "Survivant de l'année".

    Il y a un an, cette distinction est allée à Linda Cooper, la femme qui a été frappée quatre fois par la foudre. La première fois, c'était devant un bureau de poste. La deuxième fois, elle était chez elle, au téléphone. La troisième fois, elle faisait la vaisselle ; la foudre lui est remontée le long des bras. La quatrième fois, Linda était dans une voiture la fenêtre ouverte. Quatre fois, c'est beaucoup, même en Floride, où la foudre frappe en moyenne 40 fois chaque année sur chaque kilomètre carré. Mais il y a des gens qui ont été foudroyés plus souvent. Le record - sept foudroiements - est détenu par un ranger de Virginie, Roy Sullivan, aujourd'hui décédé.

    Même des années après les faits, des hommes robustes ne peuvent s'empêcher de trembler en racontant leur histoire. L'un d'eux déclare que la foudre l'a dévasté ; son esprit est maintenant lent et souvent confus. Un autre ne perçoit plus le froid. Une participante raconte comment la foudre l'a rendue irritable et hypersensible. Renee Tessler se souvient que le ciel a brusquement viré au vert. En retard pour son travail, elle a ouvert la fenêtre de sa voiture pour se faire sécher les cheveux quand la foudre l'a frappée "comme un marteau-piqueur dans les dents, raconte-t-elle. C'est la plus forte explosion que j'aie jamais entendue." C'était il y a des années, mais aujourd'hui encore, Renee a des problèmes de concentration et marche avec une canne.

    Les conséquences de la foudre, qui varient d'un individu à l'autre, sont totalement imprévisibles. Seul point commun de toutes les victimes : le temps d'un éclair, leur corps est exposé à une décharge électrique pouvant atteindre des dizaines de milliers d'ampères - de quoi alimenter des milliards d'ampoules durant cette fraction de seconde. Les séquelles dépendent du chemin que parcourt le courant dans le corps pour rejoindre le sol. Des scientifiques australiens qui ont mené des expériences sur des moutons ont montré que, lorsque la foudre frappe à la tête, elle pénètre souvent dans le corps en passant par les orifices du crâne que sont les yeux, la bouche et le nez. Humides et pourvus de réseaux nerveux hautement conducteurs, ceux-ci constituent en effet d'excellents points d'entrée. La décharge électrique peut alors détruire n'importe quelles cellules du cerveau, sans exception. Elle provoque notamment des pertes de mémoire.

    Le phénomène étant rare, très peu de médecins sont capables d'en identifier les symptômes. "Ils cherchent toujours des lésions à l'endroit où la foudre est entrée et à celui où elle est sortie", regrette Marianne Adams, membre de l'association. Or la plupart des séquelles sont très difficiles à détecter par les instruments médicaux. "Le système neurovégétatif est particulièrement vulnérable", explique le neurologue allemand Ingo Kleiter. "Il régule la pression sanguine et la sudation, mais aussi les battements cardiaques, la digestion et le rythme du sommeil", et ses lésions entraînent des conséquences très diverses.

    Plus de 1 milliard d'éclairs touchent la Terre chaque année. On dénombre 50 à 100 décès aux Etats-Unis, contre 3 à 7 en Allemagne. A Pigeon Forge, un nombre impressionnant de survivants déclarent avoir été foudroyés par un ciel clair et bleu. De fait, les décharges électriques peuvent parcourir jusqu'à 16 kilomètres. Il arrive souvent qu'aucun signe d'orage ne soit perceptible. Parfois, même, le soleil brille de tous ses feux.




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